Dr. Amy Stenehjem
« Je suis médecin et atteinte d’une maladie chronique. J’écris cet article dans l’espoir d’informer ceux qui souhaitent en apprendre plus sur les maladies chroniques. Je parle d’expérience, je suis depuis longtemps des patients atteints de ce mal, mais j’ai aussi été coincée chez moi pendant cinq ans à cause d’une maladie chronique. Je veux sensibiliser nos amis, nos proches, nos collègues et le personnel médical, afin qu’ils appréhendent mieux cette condition. Si ces informations sont partagées, elles permettront, je l’espère, de renforcer les relations, réduire l’incompréhension et améliorer la prise en charge de ces maladies chroniques. »
La maladie chronique, c’est une maladie, un état de santé ou une blessure qui peut durer toute la vie, et que l’on ne peut pas guérir, même si le patient peut entrer en rémission dans certains cas. Sa sévérité varie; certaines personnes peuvent travailler et avoir une vie « normale » et active, alors que d’autres sont très malades et restent cloitré chez eux. Beaucoup de personnes atteintes d’une maladie chronique n’ont pas de symptômes visibles. Leur gravité n’est parfois pas remarquable, ce qui peut susciter l’incompréhension et le manque de soutient des médecins, des proches ou des collègues.
Personne ne veut être malade. En tant que médecin, je n’ai jamais vu un seul patient qui appréciait sa maladie. C’était même tout le contraire; la plupart était très actifs et se retrouvaient soudain avec des montagnes de questions et de traitements pour alléger des symptômes insurmontables.
Beaucoup de médecins ne comprennent pas les maladies chroniques. Des années durant, beaucoup pensaient que certaines de ces maladies résultaient d’une dépression ou d’un trouble de l’anxiété, et qu’une aide psychiatrique était le seul traitement efficace. Mais, en dépit de nombreuses avancées médicales dans le domaines, beaucoup de médecins refusent de se mettre à la page et ne savent pas comment s’attaquer au problème. Au risque de voir leur symptômes s’aggraver, certains patients perdent donc un temps précieux à chercher un médecin capable de les diagnostiquer correctement et de leur prescrire un traitement adéquat.
Ne pas pouvoir aller au travail n’est pas synonyme de vacances. Être incapable de travailler à cause d’une maladie chronique n’a rien d’une partie de plaisir. c’est une lutte quotidienne pour effectuer les tâches les plus simples, comme sortir du lit, s’habiller, se faire à manger, etc. La maladie oblige souvent les patients à garder le lit, en dehors de leurs rendez-vous médicaux, car ils sont trop faibles pour mettre les pieds dehors. Vous vous êtes certainement déjà retrouvé coincé à la maison à cause du mauvais temps ou d’une mauvaise grippe. Rappelez-vous la frustration ressentie parce que vous ne pouviez pas sortir de la maison. Maintenant, imaginez que vous soyez coincés chez vous pendant des semaines, voir des mois? Cela serait frustrant, n’est-ce pas ?
Être atteint d’une maladie chronique peut déclencher un trop-plein d’émotions. Cette condition médicale peut en effet altérer la composition biochimique des zones du cerveau qui contrôlent les émotions. Il existe également d’autre facteurs qui peuvent influer sur l’humeur d’une personne et la faire déprimer ou s’inquiéter un peu plus. L‘attente ou la recherche d’un diagnostic, l’incapacité à travailler et de se sentir efficace, les changements dans la façon dont le couple/la famille fonctionne, une perte d’interactions sociales qui mène à l’isolement, le stress lié à l’argent, le combat permanent contre les symptômes et pour effectuer de simples tâches quotidiennes.
Les maladies chroniques génèrent souvent un sentiment de vide.
Il n’est pas inhabituel pour les patients de passer par toutes les étapes du deuil (déni, colère, marchandage, dépression et acceptation). Ils font le deuil de leur vie d’avant et de celle qu’ils doivent désormais endurer. Le sentiment d’isolement est également très fort: même si le patient veut interagir socialement, ses symptômes peuvent l’en empêcher. Il se retrouve alors incapable de passer un coup de fil, d’écrire un email ou de publier un message sur Facebook.
Les symptômes liés à une maladie chronique sont très complexes.
Les symptômes varient selon la maladie, et les patients peuvent en présenter un ou plusieurs à la fois. En voilà une liste non-exhaustive: intense fatigue, douleurs, maux de tête, incapacité à se concentrer, nausée ou étourdissements. Il n’y a rien d’inhabituel à ce que ces symptômes apparaissent et disparaissent régulièrement, parfois même en une heure. Prévoir ses activités à l’avance devient un vrai casse-tête. Un « bon jour » pour un patient atteint d’une maladie chronique pourrait être considéré comme un « mauvais jour » par quelqu’un d’autre.
L’épuisement qui résulte d’une maladie chronique n’est pas un simple coup de mou.
L’épuisement est un symptôme courant qui peut être très sévère, voire débilitant. Une activité banale ou un événement plus important, comme les fêtes de fin d’année, peuvent le déclencher. Les patients doivent alors « en payer le prix » et ont besoin de plusieurs jours ou même plusieurs semaines pour s’en remettre.
Ils ont donc besoin de beaucoup de repos et annulent souvent des sorties à la dernière minute. Cela ne veut pas dire qu’ils sont fainéants ou qu’ils se dérobent. Lorsque l’épuisement s’abat sur la personne, elle n’a d’autre choix que de rester chez elle pour se reposer. C’est comme si le corps heurtait un mur et ne pouvait aller plus loin, quel que soit l’effort fourni. SI vous voulez un peu mieux comprendre cet épuisement liés à une maladie chronique, je vous invite à lire cet article sur « la théorie de la cuillère« .
Vous vous êtes peut-être déjà retrouvé alité pendant quelques jours, après une mauvaise grippe ou une opération chirurgicale. Repensez à ce que vous avez ressenti: vous pouviez à peine sortir du lit et de simples gestes vous épuisaient. Imaginez que vous ressentez cela tous les jours, constamment, pendant des mois ou des années.
La douleur est un symptôme courant des maladies chroniques.
Cette condition s’accompagne trop souvent de douleurs intenses, comme des maux de tête, de l’arthrite, des douleurs musculaires, lombaires ou cervicales.
Ne pas avoir les idées claires est extrêmement frustrant.
C’est un symptôme compliqué à décrire. Le brouillard mental est un dysfonctionnement cognitif courant chez ces patients, et il peut se manifester de différentes manières: on peine à trouver ses mots, à se concentrer ou à se rappeler quelque chose. Les personnes qui en souffrent savent ce qu’elles veulent dire mais ne trouvent pas les mots adéquats.
Le risque d’infections est plus élevé.
Le système immunitaire des personnes atteintes par une maladie chronique peut parfois réagir excessivement. Au lieu de s’attaquer aux infections, il va perdre son temps et son énergie à lutter contre les organes du corps du patient, ou les articulations, les nerfs ou les muscles. Beaucoup de personnes souffrant de ces troubles prennent des médicaments pour réguler ce problème et doivent éviter tout contact avec des personnes malades car un simple rhume peut se transformer en une infection très grave.
Certains aliments peuvent aggraver les symptômes.
Certains aliments peuvent faire empirer les symptômes ressentis. Les coupables les plus courants sont le gluten, les produits laitiers, le sucre, le soja, la levure, l’alcool et les aliments transformés. Ces aliments déclencheurs peuvent causer des inflammations qui, en retour, provoquent une augmentation des symptômes. Ceux-ci peuvent durer des heures, des jours, voire des semaines.
Et parce que tous ces aliments font partie de notre alimentation quotidienne, il est souvent difficile d’identifier les responsables. Ne plus les intégrer dans nos assiettes devient un défi.
L’odorat est plus développé.
Certaines odeurs, comme celles des parfums, des produits ménagers ou de la cigarette, peuvent déclencher des migraines, un brouillard mental, des nausées et d’autres symptômes. On prescrit parfois des versions sous-dosées de médicaments utilisés pour les traitements cancéreux. Cette sensibilité aux odeurs est similaire à celle observée chez les femmes enceintes ou les patients traités par chimiothérapie.
Vivre avec une maladie chronique demande beaucoup d’efforts.
Il faut en effet être discipliné pour être sûr d’avoir un sommeil réparateur, éviter les déclencheurs et prendre les médicaments aux bonnes heures afin de ne pas aggraver sa condition médicale. Que ces malades chroniques veuillent parfois se sentir normal, en mangeant une part de pizza ou en veillant tard, est compréhensible, même s’ils le « paieront » plus tard.
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Malgré ce combat ponctué de souffrance, d’isolement et de symptômes débilitants, les malades chroniques (et leurs auxiliaires de vie) continuent de se battre. Ils luttent quotidiennement pour mieux appréhender leur corps et accomplir des choses que nous prenons pour acquises. Leur entourage comprend rarement leurs problèmes et ne peut donc pas les aider efficacement.
Vous pouvez faire bouger les choses pour ces patients atteints d’une maladie chronique en vous informant sur leurs symptômes et en faisant preuve d’empathie. Mieux comprendre les maladies chroniques permet de lever le voile sur les souffrances qu’elles causent. Je remercie donc tous ceux qui ont pris le temps de lire cet article !
Ce blog, écrit par le docteur Amy Stenehjem a été traduit par Héloïse Guilloteau.